17 Décembre 2009
«MON COMPAGNON ETAIT COMME ENVOUTE »
- Enquête évoquée sur le plateau de "L'info confidentielle Paris Match" sur RTL-TVI, le dimanche 13 décembre 2009 et publiée dans l'hebdomadaire "Paris Match" (Belgique), le 17 décembre 2009 -
On pourrait dire que celles et ceux qui se laissent berner par des guérisseurs et autres charlatans n'ont qu'à s'en prendre à leur propre naïveté. Mais ce serait gravement sous-estimer la capacité d'influence de certains escrocs, à laquelle s'ajoute le besoin d'espoir de certains patients plus angoissés encore que crédules. Et c'est ainsi qu'à Flobecq, un homme qui souffrait d'un cancer du poumon a été traîné jusqu'au stade terminal avec des teintures de plantes et une pommade contre le mal de dos. Il n'est malheureusement pas la première victime présumée d'une « guérisseuse » qui poursuit impunément ses activités malgré une instruction judiciaire en cours depuis début 2007.
Rita Boulion (photo de gauche) nous reçoit dans sa maison de Ressaix, près de Binche. Devant elle se trouve une boîte contenant plusieurs fioles de gouttes, une espèce d'ordonnance, des extraits de compte. Et la photo de l'homme qu'elle a aimé pendant neuf ans, Claude Jaillot (photo de droite). Pour la première fois, cette femme témoigne de son indignation. De sa colère aussi. De la mort de son compagnon dans d'atroces souffrances.
«Claude était un homme plein d'énergie. Il travaillait dans une école comme homme à tout faire »,« En octobre 2008, il a commencé à se sentir un peu affaibli. Il avait aussi un point douloureux dans le dos. Alors, comme il le faisait depuis des années, il était allé voir Claudine Desmet. à Flobecq. Cette radiesthésiste et phytothérapeute est la fille d'Azaire Desmet, le fondateur du "Centre Azaire'. Avec son pendule, elle lui a diagnostiqué un nerf coincé dans le dos. Elle a lui donc prescrit des gouttes et une pommade. Il ne fallait pas s'inquiéter, disait-elle. Claude pouvait continuer à travailler. Il était implicite qu'il ne devait pas voir de médecin.» commence-t-elle.
«Le temps a passé comme cela», continue M™ Boulion. «Claude ne disposait pas de gros revenus, mais il dépensait environ 400 euros par mois, généralement en liquide, pour se payer ce traitement inefficace. Il parlait très souvent au téléphone avec sa guérisseuse et lui rendait une visite hebdomadaire. Après le nerf coincé, alors que mon compagnon souffrait de plus en plus, Claudine Desmet a diagnostiqué un syndrome de Tietze, soit des douleurs thoraciques aiguës pouvant être causées par un hématome intercostal. Il se fait que, quelques mois plus tôt, Claude s'était fait très mal au dos en déplaçant une cuve à mazout. Ce qu'elle disait semblait donc possible. Elle conseillait des exercices d'extension, par exemple qu'il se pende par les bras à une barre, qu'il se plie en deux sur le dossier du divan... La douleur était cependant trop forte pour qu'il puisse se livrer à de tels mouvements. Il devait aussi boire du thé et manger beaucoup de légumes.»
«Mais rien de tout cela n'aurait pu le soigner d'un cancer du poumon !» s'exclame Rita. «Car c'est de cela qu'il souffrait depuis le début. Et il a supporté la douleur stoïquement, pendant des mois, à l'aide seulement de Dafalgan et de la foi qu'il avait en cette guérisseuse. Elle l'a mené en bateau jusqu'au stade terminal de la maladie, jusqu'à la dernière visite en juillet 2009 où elle lui a dit que son syndrome de Tietze venait de se transformer en cancer. J'ai pu alors le convaincre d'aller voir un médecin, mais il était trop tard. Il est mort le le 5 septembre à Jolimont (La Louvière). Vous ne pouvez pas vous imaginer à quel point je m'en veux ! Oui, je m'en voudrai toujours de n'avoir pas pu trouver les mots pour lui faire entendre raison plus tôt. Je voulais qu'il passe une radio, qu'il fasse une prise de sang, mais tout ce que je pouvais dire ne pesait pas lourd face aux prêches de Claudine Desmet. Cette guérisseuse, il la voyait depuis très longtemps. Il buvait littéralement ses paroles. C'était l'Evangile. Quelques années auparavant, Claude avait rencontré des problèmes intestinaux et il pensait lui devoir la vie. En fait, Claudine l'avait persuadé qu'elle l'avait soigné d'un cancer ! Que pouvais-je contre une telle croyance ? Je m'en veux aussi parce que, pendant trop longtemps, j'ai moi-même été bernée par cette crapule qui semblait avoir réponse à tout. Si j'avais ouvert les yeux plus vite, j'aurais changé de rythme de vie, j'aurais consacré plus de temps à Claude. Mais quand on vous rabâche pendant des mois qu'un nerf coincé est à l'origine d'un bénin mal de dos, vous ne pensez pas que la mort guette déjà. Si près. Cette femme m'a privé de moments essentiels pour Claude, ma fille et moi. Ces derniers mois de vie auraient dû se passer autrement. Je suis très en colère.»
Rita a les larmes qui lui montent aux yeux quand elle raconte. «Je ne pensais pas trouver la force de témoigner mais, en définitive, je me suis dit que mon silence serait bien trop culpabilisant », considère-t-elle encore. «Le "Centre Azaire" de Flobecq se livre à de l'exercice illégal de la médecine. Je ne peux continuer à vivre sans dénoncer ces pratiques dangereuses qui peuvent avoir des conséquences mortelles. Mon objectif n'est pas d'intenter un procès pour récupérer de l'argent, cela rassurera tout de suite M™ Desmet. Ce que je veux, c'est que la mort de Claude soit un signal d'alarme pour éviter qu'il y ait d'autres victimes. D'autres abus de confiance, d'autres non-assistances à personne en danger. Je ne comprends pas qu'un tel centre ait encore pignon sur rue après les précédentes plaintes qui ont été déposées et l'enquête qui a été ouverte au parquet de Tournai. Combien de personnes devront-elles encore mourir des mauvais traitements infligés par ces gens qui jouent au docteur sans en avoir les compétences ? »
Fin 2006, en effet, Irène Deladrière, une habitante de Braine-le-Comte, avait déjà dénoncé les pratiques pseudo-médicales de Claudine Desmet. « A l'époque, j'ai en effet déposé plainte à la police locale », explique-t-elle à Paris Match. «Francine, ma soeur, souffrait d'un cancer du foie. Je le regretterai toujours, mais j'ai eu le tort de lui parler de Claudine Desmet. Cette dernière m'avait dit être médecin, avoir travaillé en clinique et avoir quitté le milieu hospitalier parce qu'on y soignait mal les gens. Quand elle tombée entre ses griffes, Francine a été littéralement endoctrinée. Au point de stopper les visites chez son oncologue et tous les traitements en cours. Même les prises de sang étaient proscrites. M™ Desmet préférait utiliser son pendule et vendre des mélanges liquides d'extraits de plantes, ainsi que des "gélules miracles" qui coûtaient les yeux de la tête. L'état de ma sœur s'est rapidement dégradé et, après avoir perdu un temps précieux et près de 4 000 euros, elle a repris un traitement normal en clinique. Mais il était déjà trop tard. Elle n'a plus survécu que dix-huit mois. »
II y a trois ans, c'est Gilbert Dupont, du quotidien La DH Les Sports, qui avait révélé le témoignage de Mme Deladrière. La remarquable enquête de notre confrère avait ensuite mis à jour plusieurs autres témoignages, tel celui de Marta Castillo, passée elle entre les mains du père de Claudine, le dénommé Azaine Desmet. Elle expliquait que le vieil homme, fondateur du centre portant son nom, arguait posséder des pouvoirs énergétiques... Et lui avait détecté deux «masses» totalement imaginaires au niveau des ovaires. Deux ans de traitement s'étaient écoulés avant que la supercherie fût mise en évidence par des examens adéquats en milieu hospitalier. Il y avait aussi le cas de Juan-Carlos, qui s'était fait traiter une décalcification des os par des gouttes qui avaient provoqué une hémorragie au niveau des parties génitales. Celui d'Emilienne, qui s'était vu diagnostiquer une «jambe gauche plus courte» par une Claudine Desmet utilisant son pendule. Avant de s'entendre dire, par la même mais une semaine plus tard, qu'en fait c'était sa jambe droite qui était plus courte ! Le récit, encore, d'une vieille dame qui avait supprimé son traitement contre le cholestérol pour le remplacer par des gouttes prescrites par le «Centre Azaire » et qui verra, en quelques jours, son taux de mauvaise graisse passer de 257 à 351. Celui d'un chef d'entreprise bruxellois qui, souffrant d'un cancer de la plèvre, se verra déconseiller par Azaire Desmet d'encore voir «les médecins qui n'y connaissent rien» et témoignera d'avoir laissé 30 000 euros dans les caisses du centre de Flobecq... L'un des traitements qui lui avait été conseillé, outre les incontournables gouttes, avait été de se «gaver de beurre». Encore une victime qui ne fait plus partie de ce monde.
A l'époque où il mettait en lumière les activités troubles du «Centre Azaire», notre collègue de La DH avait eu la bonne idée de se faire passer pour un patient lors d'une première visite chez Claudine Desmet. Le récit qu'il publiait de cette expérience était édifiant (lire l'encadré intitulé «Faire des cumulets»). A la suite de ce ramdam médiatique et de la plainte déposée en décembre 2006 par Mme Ladrière, le Parquet de Tournai avait mis «l'affaire Azaire» à l'instruction entre les mains de la juge Bastin. Mais d'après l'avocate de la plaignante, Me Suzane Hage, «cette enquête ne semble avoir guère avancé. Ma cliente a été convoquée à Tournai, neuf mois après le dépôt de sa constitution de partie civile. Depuis lors, nous n'avons plus eu de nouvelles.» Au Parquet de Tournai, on se contente de confirmer que l'affaire est toujours à l'instruction. Mais d'autres contacts dans les milieux de l'enquête indiquent que le dossier est proche d'un aboutissement et contient assez d'éléments pour alimenter des poursuites pour exercice illégal de la médecine et de l'art de la pharmacie, ainsi que pour escroquerie et abus de confiance. Ces informations doivent cependant être relativisées par le fait objectif qu'à ce stade, il n'y Claude Jaillot n'avait a pas encore eu d'inculpations.
Paris Match a signalé à la justice tournaisienne l'existence du témoignage de Rita Boulion. Attendant la visite des enquêteurs pour déposer, l'ex-compagne de Claude Jaillot a conservé des pièces à conviction capitales. Des extraits de comptes (bien que la majorité des paiements fussent exigés en liquide par Claudine Desmet), une pseudo-ordonnance prescrivant divers produits inutiles dans le combat que devait mener cet homme contre le cancer du poumon et des bouteilles de gouttes - elle les a montré ce dimanche sur le plateau de «L'Info confidentielle Paris Match»sur RTL-TVI qu'une justice efficace se doit de saisir avant de les envoyer pour expertise dans un laboratoire. Alors que ce témoignage inédit devrait prochainement être pris en compte par la justice, on ne peut qu'être interpellé par le fait de devoir une nouvelle fois évoquer les activités suspectes du «Centre Azaire», trois ans après les premières affaires, trois ans aussi après qu'une instruction ait été ouverte. Puisse-t-elle désormais progresser plus rapidement !
LA DERNIERE ORDONNANCE
Deux mois avant sa mort, quelques jours à peine avant d'enfin se rendre à l'hôpital où on lui diagnostiquera un cancer du poumon au stade 4 devenu incurable, voici les huiles et produits Azaire prescrits par Claudine Desmet à Claude Jaillot. Nous avons tenté de décoder l'ordonnance avec un pharmacien. Le Cascara renvoie peut-être à l’écorce de Cascara sagrada, utilisée comme laxatif. Les feuilles de Cassia fistula ont également une action purgative. La propolis est considérée comme une sorte d'antibiotique naturel. C'est une matière cireuse sécrétée par les abeilles pour protéger leur ruche des infections. On l'utilise assez bien en phytothérapie pour ses propriétés anti-infectieuses. On la retrouve dans les sprays pour la gorge, les sirops, en comprimés...L'aloès do Cabo ou aloès du Cap est une plante bien connue (grand cactus commun en Méditerranée, Afrique...) qui a des propriétés laxatives. La racine d'astragale est l'un des plus grands toniques de la pharmacopée chinoise. Elle a une influence particulière sur le poumon et la rate. Douce, légèrement tiède, elle très efficace pour stimuler l'énergie défensive (pour les personnes qui attrapent des rhumes à répétition, par exemple). Les propriétés du Ganoderma lucidum sont très étendues. Elles comprennent une activité anti-inflammatoire, anti-tumorale, anti-hypertensive, une action régulatrice du glucose ainsi qu'une immuno-stimulation, ou plutôt une immuno-modulation efficace dans toutes les maladies infectieuses et virales. Il est également utilisé en Chine dans le cas d'hépatites. Gato renvoie peut-être à de la de ta « griffe de chat », soit de l'Uncaria tomentosa, qui soulage les douleurs arthritiques ou rhumatismales et stimule le système immunitaire.
«Si ces quelques teintures de plantes pouvaient guérir des pathologies aussi graves que des cancers, cela se saurait !» nous dit l'un des pharmaciens que nous avons consultés. « Je connais des médecins phytothérapeutes qui travaillent de façon semblable. Mais dans leur cas, comme ce sont réellement de vrais médecins, ils sont généralement capables de déterminer leurs propres limites et se contentent de soigner les pathologies légères ou d'accompagner les pathologies lourdes en prenant bien la précaution de ne pas détourner ce genre de patients de la médecine classique. En revanche, des non-médecins (fussent-ils parfois même pharmaciens) travaillant et traitant ainsi des malades sont de véritables criminels. Et j'ajouterais : surtout si eux-mêmes croient aux vertus de cette thérapeutique ! Les escrocs purs sont moins dangereux : ils n'y croient pas et ne détournent pas de la médecine classique !» Un détail encore, le montant de cette ordonnance commentée : 75,80 euros. Avec la mort garantie au bout du chemin, c'était encore trop cher, bien évidement. Selon Rita Boulion, Claude Jaillot a compris l'arnaque sur son lit d'hôpital : « II était très déçu. Et, vous ne serez pas étonné de l'apprendre, quand il s'est retrouvé à Jolimont, Claudine n'a plus jamais pris de ses nouvelles. »
"FAIRE DES CUMULETS" par Gilbert Dupont (texte publié dans La DH-Les Sports le 27 décembre 2006)
«La consultation commence par une fiche à remplir. Nom, prénom, date de naissance. L'adresse aussi, et un numéro de téléphone : nous mentionnons le fax de La Dernière Heure. Enfin satisfaite, Claudine Desmet, qui remplace son père en vacances à l'étranger, sort un pendule qu'elle agite au-dessus de la fiche tout en marmonnant sans rire des propos absolument inintelligibles. De longues secondes et la voilà qui décrète : "D'abord, je vois que vous avez du sable dans les reins. Pour vous en débarrasser, je vais vous demander, tous les matins, au réveil, de faire quelques cumulets : il faut empêcher que le sable qui est plus lourd reste dans le fond des reins et empêche le passage...". Des cumulets et quelques poiriers pour combattre des calculs rénaux imaginaires... Et c'est reparti avec le pendule et les incantations à voix très basse : "Je vois aussi un tassement de trois vertèbres dans le bas du dos, qui peuvent occasionner des douleurs à la jambe et dans les fesses." En vingt minutes, Claudine Desmet de chez Azaire nous trouve aussi : une inflammation à la sortie de l'estomac; une gêne dans la cage thoracique; des mucosités au niveau des sinus; un manque de vitamine D; un excès de nervosité intérieure; un estomac "qui pousse sur les poumons et provoque un manque d'oxygénation"; et une jambe plus courte que l'autre. Elle risque un coup d'œil dans notre direction et prévient: "Et je n'ai pas fini..." Encore un coup de pendule et voilà qu'elle confirme le cancer de la prostate. "Effectivement, dit-elle, votre PSA est trop élevé. Mais je vais vous rassurer: vous n'en mourrez pas. Mais il faudra suivre mes recommandations ; cesser de boire trop de café; ne plus boire ni alcool ni Coca-Cola, mais beaucoup d'eau ; ne plus manger d'aliments cuits au micro-onde, qui est cancérigène; manger lentement; cesser de consommer de la viande crue et remplacer la margarine par le beurre, car le beurre donne un peu de graisse mais pas de cholestérol. Et bien sûr, prendre les gélules spéciales contre le cancer et pour la prostate." La jambe plus courte ? Claudine Desmet, qui ne fait retirer ni le chandail ni le pantalon, doit posséder des yeux qui vous radiographient le squelette à travers la laine et la toile de Jean. Elle nous fait aligner face au mur : une minute de manipulations du bas de la colonne et voilà, fait-elle, "vos hanches sont déjà beaucoup mieux équilibrées." Sa consultation est gratuite, mais Azaire se rattrape sur la marchandise : dans la pièce d'à côté, le mari prépare déjà pour 282 € de gélules et de gouttes en flacons (NDLR: Francine Deladrière, la pauvre qui avait un vrai cancer du foie, en avait jusqu'à 529 euros). Il refuse les virements, mais exige du cash sur des factures "zéro mention" et rappelle que le prochain rendez-vous avec sa femme est déjà fixé au 22 janvier. »
« JE VOUS LAISSE PARCE QUE JE SUIS EN CONSULTATION »
Claudine Desmet n'avait pas grand-chose à décurer à Paris-Match : "Demandez à la fille de M Jaillot. C'est elle qui s'occupe de cela". C'est ce que nous avons fait...
Paris Match Belgique. La compagne d'une personne récemment décédée se plaint de la mauvaise qualité de la thérapie qu'elle aurait suivie sur vos conseils.
Claudine Desmet. Je vends des produits, je ne donne pas de consultations.
Il s'agit du cas de M. Claude Jaillot.
Oui.
Vous confirmez que ce monsieur vous consultait ?
Demandez à sa fille, c'est elle qui s'occupe de cela.
Vous n'avez donc aucun commentaire à faire ?
Non, je n'ai rien à faire. Je suis commerçante. Je vends mes produits. Et c'est tout.
Ne nous reprochez pas par la suite de n'avoir pas pu exprimer votre point de vue dans l'article que nous publierons...
Ben, si. Je porterai plainte de toute manière.
De toute manière ! Peu importe... Vous n'avez rien à nous déclarer, vraiment ?
Mais non, je fais ce que les gens me demandent. Si les gens me demandent d'acheter ceci ou cela, eh bien, je leur donne. C'est tout.
Ce n'est pas vous qui leur dites ce qu'ils doivent prendre ?
Les gens me demandent tel produit, je leur vends tel produit.
Et vous ne leur dites pas de prendre tel ou tel produit ?
S'ils me demandent de prendre un produit pour le poumon, je donne le produit pour le poumon, c'est tout. Ce sont des produits agréés par l'Afsca.
Avez déconseillé à M. Jaillot de consulter un médecin ?
Non, jamais. Les gens sont libres d'aller où ils veulent. Voilà, je vous laisse parce que je suis en consultation.
Fin de l'entretien avec Claudine Desmet. Comme elle nous l'a conseillé, nous avons également entendu le point de vue de la fille de M. Jaillot, laquelle nous a demandé de ne pas révéler son prénom.
Paris-Match Belgique. Estimez-vous que votre père a été bien soigné par Claudine Desmet ?
La fille de M. Jaillot. Oui. Je pense qu'elle a fait tout son possible. Maintenant, elle ne sait pas faire de miracle. En médecine traditionnelle, on ne sait pas en faire non plus. Que ce soit par la médecine traditionnelle ou la médecine parallèle, on ne sait pas encore bien guérir le cancer du poumon. Il suffit de regarder la télé ou Internet pour s'en rendre compte.
Claudine Desmet n'aurait-elle pas dû envoyer votre père chez un médecin spécialisé ?
Elle laisse toujours le choix. Je l'ai constaté à plusieurs reprises. Quand la maladie arrive à un stade grave, elle donne toujours le choix de se faire soigner autrement. Autant ma belle-mère que moi, on a proposé à mon père d'aller voir un médecin et il ne voulait pas. Il était catégorique.
Mme Desmet ne devait-elle pas lui dire qu'elle ne pouvait rien par rapport à son cancer ?
Elle lui a dit qu'elle lui donnait ce qu'il fallait mais elle a précisé qu'elle n'était pas certaine d'arriver à quelque chose. C'est pour cela qu'elle lui a donné le choix.
A quel moment ? Il est tout de même rentré à l'hôpital très tard...
Oui, le 3 août 2009.
Et il est mort le 5 septembre...
Un mois pile après. En fait, mon père nous a longtemps caché sa maladie. A moi, parce qu'il savait que j'étais sensible et qu'on était fort proches. A ma belle-mère aussi, parce qu'autrefois mon grand-père qui avait été atteint d'un cancer du poumon s'était fait quitter par sa compagne quand il le lui avait annoncé. Mon père avait peur que l'histoire se reproduise.
Selon vous, depuis quand savait-il qu'il avait un cancer du poumon ?
Je ne sais pas exactement, mais je dirais depuis le début de l'année 2009. Février ou mars.
Vous nous dites qu'il allait prendre des gouttes et de la pommade pour le dos chez M"" Desmet en sachant de quelle maladie il souffrait et en étant persuadé que c'est cela qui allait le sauver ?
Oui parce qu'en fait, cela faisait vingt-cinq ans qu'il se soignait là, ainsi que ma maman, une bonne partie de la famille et moi. Or, Claudine Desmet a fait ses preuves en vingt-cinq ans. On a vu et entendu des choses qui font qu'on y croit. Et j'y crois encore parce que je continue à y aller.
Ainsi, vous croyez qu'elle soigne des cancers ?
Peut-être pas tous, mais en tout cas une partie, oui. Et si elle ne sait pas les soigner, elle laisse toujours le choix à la personne qui est en face d'elle d'aller voir ailleurs. Cela, c'est sûr et certain.
Mais si elle laisse entendre qu'elle peut soigner des cancers, cela relève de l'escroquerie !
En fait, elle ne dit pas le nom de la maladie.
Selon votre belle-mère, Claudine Desmet a bien expliqué à votre papa que lorsqu'il avait connu des problèmes intestinaux, il y a quelques années, elle l'avait débarrassé d'un cancer à l'intestin.
Oui, elle le lui a dit après.
Elle fait donc croire aux gens qu'elle soigne des cancers, ce qui est scientifiquement impossible avec les traitements qu'elle donne !
Chacun est libre de croire en ce qu'il veut. Moi, j'y crois, voilà ! Mon père y croyait très fort.
Mais si les gouttes de chez Azaire soignaient le cancer, cela se saurait. On en parlerait dans le monde entier !
Dans le monde actuel, avec toutes les choses qu'on nous cache, je ne le pense pas. On nous cache tellement de choses.
A propos de mensonges, vous nous dites que votre père dissimulaitson cancer.
Oui.
Mais il y a eu des consultations auxquelles vous avez assisté, ainsi que Mme Boulion. Et il n'était toujours question que de nerf coincé dans le dos.
Oui, c'était un arrangement entre eux pour qu'on ne sache rien.
Peut-être ne défendez-vous pas bien M'™ Desmet. Car ce que vous dites à propos du «secret» qu'elle partageait avec votre père est accablant. Si c'est exact, cela ne l'a pas empêchée de lui vendre des gouttes et autres produits pendant des mois alors que c'était inutile d'un point de vue thérapeutique. La question centrale est évidemment de savoir si elle a fait naître, ne fût-ce que de manière infime, l'espoir que les produits qu'elle lui vendait étaient de nature à le guérir du cancer.
Je ne sais pas ce qu'elle lui a dit à cet égard.
Qui a convaincu votre père que tout acte de médecine traditionnelle (médicament, radio, chimio, prise de sang) serait mauvais pour lui ?
Ce n'est pas Azaire. Mon papa était une personne intelligente et expérimentée qui s'intéressait à beaucoup de choses.
Vous n'allez pas un peu trop loin dans votre défense de Mme Desmet ?
C'est mon problème. J'y crois. C'est mon opinion, vous avez le droit d'avoir la vôtre.
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