Chronique « Si on me laisse dire » publiée dans le quotidien « La Dernière Heure » en marge du procès de Marc Dutroux et consorts
Dutroux, le monstre. Mais encore ? (45 – Le 6 mai 2004)
Journée particulièrement sombre hier à Arlon. Des heures durant, les jurés ont été invités à se pencher sur ce que fut la vie intime de Marc Dutroux, ses relations avec ceux qui lui furent proches, sa psychologie. Sans surprise, bien évidemment, il leur a été confirmé que le principal accusé de ce procès est un personnage monstrueux. Un type qui se caractérise par la pauvreté de ses émotions. Par l’absence totale d’altruisme, de sentiments, de bonté désintéressée. Un sale bonhomme complètement asocial, insensible, sans remords et n’étant mu dans son rapport au monde que par un narcissisme surdimensionné.
Pour les psychiatres, ce type de profil porte un nom : «psychopathe». Et le professeur Walter Denys a expliqué à la cour que le psychopathe Dutroux est un sujet exceptionnel : sur 3.300 expertises judiciaires réalisée durant sa longue carrière, ce spécialiste n’a vu que trois cas de ce genre. Et encore! Dutroux serait à mettre sur la première marche de ce podium de l’horreur… Je suppose que, dans sa logique toute particulière, le kidnappeur d’enfants aura apprécié ce classement. Y voyant même un compliment.
Voilà donc confirmé que Dutroux est un caricature d’être humain. Disons qu’il est ce que notre espèce peut produire de plus vil. Disons même les choses comme elles sont : ce type est clairement une crapule et il n’inspire nullement la pitié – ce qui rappelons-le, ne lui enlève pas le droit à un procès équitable. Sa longue «carrière» de brute épaisse s’attaquant aux plus faibles a commencé bien avant les enlèvements d’enfants. Sa première femme, F. D., en a notamment témoigné hier. Battue alors qu’elle était enceinte, manipulée, abusée… elle en a vu de toutes les couleurs. A la différence de Michelle Martin, elle n’a cependant jamais suivi Dutroux sur les chemins du crime et de l’horreur. D’ailleurs, il est clairement apparu ce mercredi que la plongée de Dutroux dans la grande criminalité s’opère véritablement à partir du moment où il commence à vivre –début 1983- avec celle qui deviendra sa seconde épouse.
Quelle a été l’interaction entre ces deux-là ? Peut-on se contenter de la version de la femme soumise ? Peut-on se satisfaire du constat que Dutroux est à la fois un manipulateur et un violent qui terrorisait son entourage ? Ce serait trop court, vu les mensonges évidents de Martin sur des pans essentiels du dossier. Etant donné aussi son rôle actif dans les séquestrations de plusieurs victimes. Malheureusement, les psychiatres entendus hier n’ont examiné que le seul Marc Dutroux. Le cas Martin ayant été sondé par d’autres psychiatres, ils ne peuvent répondre à la question de savoir si, dans ce couple, des perversités étaient partagées, voire si elles se renforçaient. Dommage. La question se pose aussi quant aux relations que Dutroux entretenait avec les autres accusés. Les expertises, les témoignages entendus, le comportement de Dutroux lui-même durant ce procès ont en effet démontré que le caractère monstrueux de Dutroux est tellement patent. Ils ne pouvaient pas ne pas le voir. Que lui ont-il trouvé ? Quels étaient les atomes crochus ?