Une enquête évoquée le dimanche 7 septembre 2008 sur le plateau de « L’Info Confidentielle Paris-Match/RTL-TVI » et publiée dans l’hebdomadaire Paris Match, le 11 septembre 2008.
Victimes de promesses audacieuses d’un cabinet ministériel et d’un imbroglio administratif, Muriel Libert attend depuis presque deux ans que la Communauté française lui fournisse le logement de fonction auquel elle a droit ou, à défaut, une indemnité compensatoire. En désespoir de cause, depuis plusieurs mois maintenant, l’administratrice sans domicile fixe s’est mise à « camper » dans des locaux insalubres sur son lieu de travail, l’Internat autonome de la Communauté française.

Ex-sportive de haut niveau, Muriel Libert a incontestablement la pêche. Et quand on la rencontre dans son bureau un peu kitsch, rue de Bourgogne à Forest, on comprend vite que cette femme sait ce qu’elle veut. Pas facile d’en placer une quand elle témoigne ! Faut dire qu’à sa place, on serait aussi quelque peu électrisé. En cause, les très nombreuses embûches qui se sont présentées sur sa route depuis qu’elle gère l’Internat autonome de la Communauté française (IACF).
Madame l’administratrice raconte : « J’ai fait un premier passage éclair dans cet établissement au printemps 2005. Deux mois. Je remplaçais Mme Léona B., l’administratrice faisant fonction de l’époque. Cette dame était elle-même le substitut de Mme Sophie M., l’administratrice en titre de l’IACFqui, depuis le 1er septembre 2003, avait entamé un « congé pour mission » (N.d.l.r. : encore en cours) au sein de l’Administration générale de la Communauté française. A Forest, j’ai découvert un vieux paquebot fatigué qui prenait l’eau de toutes parts : le nombre de résidents était dramatiquement bas, la qualité de certains membres du personnel laissait à désirer, la démotivation était omniprésente, et l’état de nombreux locaux était désastreux. Il faisait sale : les rideaux qui pendaient aux fenêtres des chambres n’avaient pas été lavés depuis 1998 ! Et puis, surtout, les comptes de l’internat ne tombaient pas juste, ce qui n’augurait rien de bon pour l’avenir. Malgré ces handicaps, l’endroit me plaisait. Relancer les machines de ce navire en perdition me semblait être un beau défi à relever. »
Fin novembre 2006, c’est donc avec beaucoup d’enthousiasme que Muriel Libert apprend qu’elle est une nouvelle fois désignée pour pallier un autre congé de maladie de Léona B. : « Je ne savais pas combien de temps ce remplacement durerait. Etant domiciliée du côté de Perwez, je faisais les allers-retours. Deux fois par jour quand un pépin se produisait à l’internat. Par exemple, un sabotage ou un vol pendant la nuit… ». De fait, le dossier que nous communique Mme Libert contient de nombreuses plaintes à la police de Forest pour des dégradations diverses portées aux locaux de l’internat.
« Depuis que j’ai pris cette fonction », affirme-t-elle, « les intimidations se sont succédé. Le dernier événement en date étant une mise à sac de ma voiture, qui était garée dans le parking fermé de l’internat. On a aussi saboté le tableau électrique de l’internat, les connections internet, le téléphone. Un soir, on m’a poursuivi dans un couloir, un autre soir quelqu’un a foré dans la serrure de la porte de l’étude dans laquelle je logeais. Je me suis enfuie en sautant par une fenêtre. Parfois, il y a aussi des types bizarres qui circulent dans la cour… » Un vrai film d’épouvante ! Qui voudrait la peau de l’administratrice ? « J’ai bien ma petite idée et j’en ai parlé à la police. Je crois qu’on veut mettre mes nerfs à l’épreuve. On veut me faire péter les plombs, me donner envie de partir d’ici », se contente-t-elle de répondre, énigmatique… Renseignement pris à bonne source, Mme Libert a désigné deux suspects à la police : Sophie M., l’administratrice en « congé », et un membre du personnel de l’internat.
Sophie M. s’inscrit en faux contre de ces allégations mais, selon son syndicat, elle ne peut nous faire valoir ses arguments de vive voix ! Le cabinet de Marie-Dominique Simonet (cdH), qui exerce la tutelle sur l’internat, nous a pourtant indiqué qu’il ne voyait aucun inconvénient à ce que cette dame – à l’instar de Mme Libert – puisse s’exprimer publiquement… « Certes, mais c’est Jean-Pierre Hubin, l’administrateur général de la Communauté française, où Mme M. est en mission pour l’instant, qui s’y oppose », nous dit le président du SLFP (Syndicat libre de la Fonction Publique), Yves Delbeck. Et d’ajouter que « dans cette affaire, c’est plutôt Sophie M. qui se sent agressée par Mme Libert. Chaque fois qu’il y a un problème à l’internat, notre affiliée est montrée du doigt par l’administratrice faisant fonction. C’est une forme de harcèlement ! ».
Impossible pour nous de trancher quant à l’origine des dégradations constatées régulièrement à l’Internat de Forest. On laissera la justice faire son travail. Le seul constat à notre portée étant que Muriel Libert et Sophie M. ont, en tous cas, un gros différend qui pourrait être de nature à ce qu’elles se crêpent le chignon : le logement de fonction de l’Internat.
Tout le monde a raison
« Pour relancer l’activité de l’IACF, Muriel Libert a dû travailler de très longues journées. Au bout d’un certain temps, continuer à loger en province devenait extrêmement pénible en regard de sa tâche d’administratrice, qui nécessite une présence quasi permanente sur son lieu de travail. Alors, elle a demandé ce qui lui était dû légalement : un logement de fonction », explique la syndicaliste Valérie De Nayer (C.g.s.p.-Enseignement), qui épaule l’administratrice sans domicile fixe depuis des mois. Muriel Libert complète : « Petit à petit, ma situation est devenue moins provisoire. Léona B., la dame qui m’avait précédée au poste d’administratrice faisant fonction, a été l’objet d’une enquête pour mauvaise gestion. En juillet 2007, la ministre Simonet a mis fin à sa désignation. A partir de là, je devenais véritablement l’administratrice faisant fonction. Obtenant de bons résultats (retour des inscriptions, obtention de subsides pour rénover des locaux, conventions avec l’A.d.e.p.s., des ambassades étrangères…), je voulais m’investir plus encore. L’intérêt du service commandait que je sois présente sur place le plus souvent possible, la disponibilité étant essentielle pour une administratrice d’internat. C’est aussi ce contexte qui contribué à ce que je demande à la Communauté française de m’octroyer le logement normalement lié à ma fonction. »
Un arrêté royal du 26 février 1965 prévoit, en effet, que les administrateurs d’internat font partie des agents de l’Etat « astreints à occuper des logements déterminés parce que leurs fonctions réclament leur présence permanente sur les lieux du travail ». En d’autres termes, la Communauté française est tenue de mettre à la disposition de ces agents un logement sur les lieux du travail (art. 2 de l’Arrêté) ; si ce n’est pas possible, « il met à leur disposition une habitation située dans un rayon de 2 km des lieux du travail » (art. 3). En outre, la Communauté française fournit le gaz, le chauffage et l’électricité dans ces logements de fonction.
Sur le site de l’IACF de Forest, un tel logement de fonction existe mais il est occupé depuis plus de vingt ans par l’administratrice en titre, Sophie M. Et pour elle, pas question de le quitter ! Notre enquête confirme que Sophie M. n’exerce plus réellement la fonction de gestionnaire de l’internat depuis 2003, car elle est « en congé pour mission sous la responsabilité fonctionnelle de l’administrateur général de la Communauté française », où elle est active dans le domaine de l’Education relative à l’environnement. Sur le site www.enseignement.be, on peut lire que les écoles qui veulent se mettre en rapport avec Sophie M. – par exemple pour l’organisation de classes de dépaysement – doivent écrire au n°107 de l’avenue Victor Rousseau à Forest. Cette adresse est aussi celle du logement de fonction de l’Internat… qui est donc aussi officiellement son lieu de travail.
Qui a droit au logement de fonction de l’IACF ? Muriel Libert ou Sophie M. ? La ministre de l’Enseignement supérieur a d’abord pris clairement le parti de Mme Libert. « Camper de la sorte dans des locaux sommairement aménagés, ce n’est pas une situation correcte. C’est pourquoi, en août dernier, on a enjoint à Sophie M. de libérer le logement de fonction dans les quatre mois », confirme Michel Weber, le chef de cabinet de Marie-Dominique Simonet. Du point de vue du syndicat de Mme Libert, une telle décision était l’évidence : « Même si elle n’est pas l’administratrice en titre, c’est elle qui exerce effectivement la fonction, elle en a toutes les charges (horaires astreignants, nécessité de disponibilité). Elle doit donc aussi disposer des facilités liées à l’accomplissement de cette tâche. Il n’y a par contre aucune nécessité fonctionnelle à la présence de Sophie M. dans ce logement », estime Valérie De Nayer.
Cela dit, Sophie M. ne manque pas d’arguments. Certains ne sont pas pertinents du tout : « Quand on lui a signifié notre intention de la voir quitter le logement, on a reçu des interventions de toutes parts. Anciens directeurs généraux, hommes politiques de différents partis », affirme Michel Weber. Un étalage relationnel pourtant bien inutile, car les arguments juridiques qu’ont développé les avocats de l’administratrice en titre semblent largement suffire à lui garantir la conservation de son logement de fonction. Outre le fait qu’il s’agit de l’adresse officielle d’où elle exerce sa mission actuelle, les avocats de Sophie M. ont fait remarquer au cabinet Simonet que leur cliente pourrait redevenir à tout moment, selon son souhait, l’administratrice effective de l’IACF. « En plus, du temps du ministre Hazette (MR), quand Sophie M. a été nommée pour sa mission, la question du logement n’a pas du tout été posée… C’est tout à fait injuste de la mettre maintenant sur le tapis », déclare le président du SLFP, qui nous annonce au passage que Sophie M. compte bien reprendre sa place après 2009… Alors qu’elle aura pratiquement atteint l’âge de la pension.
Sophie M. dispose encore d’un autre argument juridique béton : l’article de l’arrêté royal de 1965 qui prévoit les cas de figure où un administrateur d’internat peut se voir priver de son logement de fonction n’a pas pris en compte son cas de figure : le « congé pour mission ». Une faille juridique qui revient à conclure que la personne qui a le plus besoin du logement convoité – ici Mme Libert – en est réglementairement privée… Mais c’est la loi et, dans un Etat de droit, la loi doit être respectée. Ou alors, elle doit être modifiée.
« Plan B » ou « plan C » ?
Le problème, pour Mme Libert, c’est qu’on lui a fait miroiter pendant trop longtemps qu’elle disposerait pourtant bien du logement de Sophie M. On ? Le cabinet de la ministre Simonet. De bonne foi ? Sans doute. Maladroitement ? Certainement. Différentes pièces écrites (courriers, e-mails) en possession de l’administratrice faisant fonction établissent à suffisance que des collaborateurs de la ministre Simonet lui ont explicitement indiqué qu’ils arriveraient à faire « évacuer » ledit logement… « Il était d’abord question de la fin novembre 2007… Dès juillet de l’année dernière, avec l’autorisation du cabinet et pour l’intérêt du service, j’ai donc déménagé vers l’internat. J’ai aménagé un dortoir dans une salle d’étude où il n’y avait même pas de sanitaires. Je l’ai quitté plus tard pour le local insalubre mais mieux sécurisé où je loge encore en ce moment. J’étais persuadée que tout cela était du provisoire… Ensuite, on m’a dit qu’il faudrait attendre la fin décembre 2007. Et puis, il fallait que je patiente jusqu’à la période de carnaval 2008… Ces promesses m’encourageaient à rester dans mon campement… Mais aujourd’hui, je n’ai toujours pas de logement ! »
Terrain juridique mal débroussaillé ? Au bout de plusieurs mois d’attente et après des courriers bien argumentés des avocats de Sophie M., le cabinet de Marie-Dominique Simonet a, de toute évidence, renoncé à encore faire évacuer le logement de fonction. « L’affaire est sur le terrain juridique. Cela nous bloque », nous dit diplomatiquement le chef de cabinet de la ministre. Et c’est d’évidence un plan B qui est privilégié lorsque nous rencontrons Michel Weber : « Il y a plusieurs semaines déjà que Marie-Dominique Simonet a donné des instructions pour qu’une indemnité soit donnée à Mme Libert en compensation de l’absence de logement de fonction. Seulement, voilà : les administrations de l’Enseignement et de l’Infrastructure se sont renvoyées le dossier et on a perdu du temps. Dès la semaine prochaine, je remets cette demande sur la table et je vais œuvrer pour que l’indemnité soit rétroactive. »
« Nous sommes en septembre 2008. Je suis toujours dans mon campement et j’attends encore le premier franc d’indemnité », s’indigne Mme Libert. Et elle menace : « Cela a trop duré. Je suis épuisée. Si cela continue, je vais démissionner. Tant pis pour cet internat qui est en train de reprendre vie ! ». « Ce serait dommage qu’elle parte. Mme Libert fait du bon travail », réagit Michel Weber. Et de poursuivre, élogieux : « Si elle campe sur place, c’est dans l’intérêt du service, car dans cet internat, il peut y avoir des tas de problèmes à régler dans l’urgence. En agissant ainsi, Mme Libert montre qu’elle a une belle conscience professionnelle ; elle vit des moments difficiles pour faire tourner son établissement. C’est pourquoi nous sommes déterminés à trouver une solution financière en attendant… ».
Une solution financière ? Il y a peut-être une autre piste. Nous signalons au chef de cabinet de Mme Simonet que notre enquête nous a amené à découvrir qu’un logement de fonction est toujours occupé par Léona B. alors que, légalement, elle n’y a plus droit. Cette dernière, alors qu’elle était administratrice f.f. à l’Internat autonome de Forest, avait reçu un logement de fonction dans l’internat de l’Athénée royal Victor Horta qui se trouve pratiquement en face. Etant donné que la ministre Simonet a mis fin à sa désignation en juillet 2007, Léona B. devait normalement quitter le logement de fonction et retrouver le poste où elle était nommée (économe à l’Athénée de Koekelberg). Elle n’a pas quitté le logement et, désormais la situation est encore plus cocasse… En effet, Mme Léona B. est retraitée depuis cet été 2008, mais elle est toujours dans son logement de fonction ! « Je ne le savais pas. L’internat de Horta est sous la tutelle du ministre Dupont », nous dit le chef de cabinet de Mme Simonet.
Et, de son côté, Tony Pelosato, le chef de cabinet du ministre Dupont, nous dit qu’il y a dû y avoir « un couac dans la circulation des informations » car, de fait, si Léona B. a perdu son mandat d’administratrice, elle n’a plus à être logée aux frais de la Communauté française ! C’est ainsi qu’apparaît un « plan C » que nous suggérons à nos interlocuteurs ministériels : l’appartement actuellement occupé de manière irrégulière pourrait-il se libérer au profit de Muriel Libert ? Les deux chefs de cabinet se concertent. Ils marquent leur accord. Mme Libert se déclare aussi satisfaite de cette solution. « Je voudrais tout de même voir ce que c’est mais de toute manière, il ne me faut pas le grand luxe. J’ai plus vraiment l’habitude » commente-t-elle avec un certain sens de l’humour. « Cette solution pourrait être acceptable pour notre affiliée. A condition qu’on ne la fasse pas à nouveau languir pendant des mois. Et si on l’indemnise pour les mois de galère qu’elle vient de vivre… C’est tout de même incroyable qu’on en soit là, seulement aujourd’hui… Cette solution se présentait déjà depuis près d’un an puisque Léona B a été démise en juillet 2007 ! », commente Valérie De Nayer.
Un dossier d’indemnisation est aussi en cours nous confirme-t-on tant chez Mme Simonet que chez M.Dupont…
Le bout du tunnel est peut-être très proche pour Mme Libert. Encore faudra-t-il aussi que les actes de vandalisme et de sabotage s’arrêtent à l’IACF. A cet égard, la CGSP-Enseignement par la bouche de Valérie De Nayer suggère « qu’il faudrait sérieusement songer à sécuriser le site dans l’intérêt de tous les travailleurs de l’internat ». Encore une évidence, comme le fait qu’il s’agit d’une affaire à suivre…
Une enquête évoquée le dimanche 7 septembre 2008 sur le plateau de « L’Info Confidentielle Paris-Match/RTL-TVI » et publiée dans l’hebdomadaire Paris Match, le 11 septembre 2008.
Victimes de promesses audacieuses d’un cabinet ministériel et d’un imbroglio administratif, Muriel Libert attend depuis presque deux ans que la Communauté française lui fournisse le logement de fonction auquel elle a droit ou, à défaut, une indemnité compensatoire. En désespoir de cause, depuis plusieurs mois maintenant, l’administratrice sans domicile fixe s’est mise à « camper » dans des locaux insalubres sur son lieu de travail, l’Internat autonome de la Communauté française.

Ex-sportive de haut niveau, Muriel Libert a incontestablement la pêche. Et quand on la rencontre dans son bureau un peu kitsch, rue de Bourgogne à Forest, on comprend vite que cette femme sait ce qu’elle veut. Pas facile d’en placer une quand elle témoigne ! Faut dire qu’à sa place, on serait aussi quelque peu électrisé. En cause, les très nombreuses embûches qui se sont présentées sur sa route depuis qu’elle gère l’Internat autonome de la Communauté française (IACF).
Madame l’administratrice raconte : « J’ai fait un premier passage éclair dans cet établissement au printemps 2005. Deux mois. Je remplaçais Mme Léona B., l’administratrice faisant fonction de l’époque. Cette dame était elle-même le substitut de Mme Sophie M., l’administratrice en titre de l’IACFqui, depuis le 1er septembre 2003, avait entamé un « congé pour mission » (N.d.l.r. : encore en cours) au sein de l’Administration générale de la Communauté française. A Forest, j’ai découvert un vieux paquebot fatigué qui prenait l’eau de toutes parts : le nombre de résidents était dramatiquement bas, la qualité de certains membres du personnel laissait à désirer, la démotivation était omniprésente, et l’état de nombreux locaux était désastreux. Il faisait sale : les rideaux qui pendaient aux fenêtres des chambres n’avaient pas été lavés depuis 1998 ! Et puis, surtout, les comptes de l’internat ne tombaient pas juste, ce qui n’augurait rien de bon pour l’avenir. Malgré ces handicaps, l’endroit me plaisait. Relancer les machines de ce navire en perdition me semblait être un beau défi à relever. »
Fin novembre 2006, c’est donc avec beaucoup d’enthousiasme que Muriel Libert apprend qu’elle est une nouvelle fois désignée pour pallier un autre congé de maladie de Léona B. : « Je ne savais pas combien de temps ce remplacement durerait. Etant domiciliée du côté de Perwez, je faisais les allers-retours. Deux fois par jour quand un pépin se produisait à l’internat. Par exemple, un sabotage ou un vol pendant la nuit… ». De fait, le dossier que nous communique Mme Libert contient de nombreuses plaintes à la police de Forest pour des dégradations diverses portées aux locaux de l’internat.
« Depuis que j’ai pris cette fonction », affirme-t-elle, « les intimidations se sont succédé. Le dernier événement en date étant une mise à sac de ma voiture, qui était garée dans le parking fermé de l’internat. On a aussi saboté le tableau électrique de l’internat, les connections internet, le téléphone. Un soir, on m’a poursuivi dans un couloir, un autre soir quelqu’un a foré dans la serrure de la porte de l’étude dans laquelle je logeais. Je me suis enfuie en sautant par une fenêtre. Parfois, il y a aussi des types bizarres qui circulent dans la cour… » Un vrai film d’épouvante ! Qui voudrait la peau de l’administratrice ? « J’ai bien ma petite idée et j’en ai parlé à la police. Je crois qu’on veut mettre mes nerfs à l’épreuve. On veut me faire péter les plombs, me donner envie de partir d’ici », se contente-t-elle de répondre, énigmatique… Renseignement pris à bonne source, Mme Libert a désigné deux suspects à la police : Sophie M., l’administratrice en « congé », et un membre du personnel de l’internat.
Sophie M. s’inscrit en faux contre de ces allégations mais, selon son syndicat, elle ne peut nous faire valoir ses arguments de vive voix ! Le cabinet de Marie-Dominique Simonet (cdH), qui exerce la tutelle sur l’internat, nous a pourtant indiqué qu’il ne voyait aucun inconvénient à ce que cette dame – à l’instar de Mme Libert – puisse s’exprimer publiquement… « Certes, mais c’est Jean-Pierre Hubin, l’administrateur général de la Communauté française, où Mme M. est en mission pour l’instant, qui s’y oppose », nous dit le président du SLFP (Syndicat libre de la Fonction Publique), Yves Delbeck. Et d’ajouter que « dans cette affaire, c’est plutôt Sophie M. qui se sent agressée par Mme Libert. Chaque fois qu’il y a un problème à l’internat, notre affiliée est montrée du doigt par l’administratrice faisant fonction. C’est une forme de harcèlement ! ».
Impossible pour nous de trancher quant à l’origine des dégradations constatées régulièrement à l’Internat de Forest. On laissera la justice faire son travail. Le seul constat à notre portée étant que Muriel Libert et Sophie M. ont, en tous cas, un gros différend qui pourrait être de nature à ce qu’elles se crêpent le chignon : le logement de fonction de l’Internat.
Tout le monde a raison
« Pour relancer l’activité de l’IACF, Muriel Libert a dû travailler de très longues journées. Au bout d’un certain temps, continuer à loger en province devenait extrêmement pénible en regard de sa tâche d’administratrice, qui nécessite une présence quasi permanente sur son lieu de travail. Alors, elle a demandé ce qui lui était dû légalement : un logement de fonction », explique la syndicaliste Valérie De Nayer (C.g.s.p.-Enseignement), qui épaule l’administratrice sans domicile fixe depuis des mois. Muriel Libert complète : « Petit à petit, ma situation est devenue moins provisoire. Léona B., la dame qui m’avait précédée au poste d’administratrice faisant fonction, a été l’objet d’une enquête pour mauvaise gestion. En juillet 2007, la ministre Simonet a mis fin à sa désignation. A partir de là, je devenais véritablement l’administratrice faisant fonction. Obtenant de bons résultats (retour des inscriptions, obtention de subsides pour rénover des locaux, conventions avec l’A.d.e.p.s., des ambassades étrangères…), je voulais m’investir plus encore. L’intérêt du service commandait que je sois présente sur place le plus souvent possible, la disponibilité étant essentielle pour une administratrice d’internat. C’est aussi ce contexte qui contribué à ce que je demande à la Communauté française de m’octroyer le logement normalement lié à ma fonction. »
Un arrêté royal du 26 février 1965 prévoit, en effet, que les administrateurs d’internat font partie des agents de l’Etat « astreints à occuper des logements déterminés parce que leurs fonctions réclament leur présence permanente sur les lieux du travail ». En d’autres termes, la Communauté française est tenue de mettre à la disposition de ces agents un logement sur les lieux du travail (art. 2 de l’Arrêté) ; si ce n’est pas possible, « il met à leur disposition une habitation située dans un rayon de 2 km des lieux du travail » (art. 3). En outre, la Communauté française fournit le gaz, le chauffage et l’électricité dans ces logements de fonction.
Sur le site de l’IACF de Forest, un tel logement de fonction existe mais il est occupé depuis plus de vingt ans par l’administratrice en titre, Sophie M. Et pour elle, pas question de le quitter ! Notre enquête confirme que Sophie M. n’exerce plus réellement la fonction de gestionnaire de l’internat depuis 2003, car elle est « en congé pour mission sous la responsabilité fonctionnelle de l’administrateur général de la Communauté française », où elle est active dans le domaine de l’Education relative à l’environnement. Sur le site www.enseignement.be, on peut lire que les écoles qui veulent se mettre en rapport avec Sophie M. – par exemple pour l’organisation de classes de dépaysement – doivent écrire au n°107 de l’avenue Victor Rousseau à Forest. Cette adresse est aussi celle du logement de fonction de l’Internat… qui est donc aussi officiellement son lieu de travail.
Qui a droit au logement de fonction de l’IACF ? Muriel Libert ou Sophie M. ? La ministre de l’Enseignement supérieur a d’abord pris clairement le parti de Mme Libert. « Camper de la sorte dans des locaux sommairement aménagés, ce n’est pas une situation correcte. C’est pourquoi, en août dernier, on a enjoint à Sophie M. de libérer le logement de fonction dans les quatre mois », confirme Michel Weber, le chef de cabinet de Marie-Dominique Simonet. Du point de vue du syndicat de Mme Libert, une telle décision était l’évidence : « Même si elle n’est pas l’administratrice en titre, c’est elle qui exerce effectivement la fonction, elle en a toutes les charges (horaires astreignants, nécessité de disponibilité). Elle doit donc aussi disposer des facilités liées à l’accomplissement de cette tâche. Il n’y a par contre aucune nécessité fonctionnelle à la présence de Sophie M. dans ce logement », estime Valérie De Nayer.
Cela dit, Sophie M. ne manque pas d’arguments. Certains ne sont pas pertinents du tout : « Quand on lui a signifié notre intention de la voir quitter le logement, on a reçu des interventions de toutes parts. Anciens directeurs généraux, hommes politiques de différents partis », affirme Michel Weber. Un étalage relationnel pourtant bien inutile, car les arguments juridiques qu’ont développé les avocats de l’administratrice en titre semblent largement suffire à lui garantir la conservation de son logement de fonction. Outre le fait qu’il s’agit de l’adresse officielle d’où elle exerce sa mission actuelle, les avocats de Sophie M. ont fait remarquer au cabinet Simonet que leur cliente pourrait redevenir à tout moment, selon son souhait, l’administratrice effective de l’IACF. « En plus, du temps du ministre Hazette (MR), quand Sophie M. a été nommée pour sa mission, la question du logement n’a pas du tout été posée… C’est tout à fait injuste de la mettre maintenant sur le tapis », déclare le président du SLFP, qui nous annonce au passage que Sophie M. compte bien reprendre sa place après 2009… Alors qu’elle aura pratiquement atteint l’âge de la pension.
Sophie M. dispose encore d’un autre argument juridique béton : l’article de l’arrêté royal de 1965 qui prévoit les cas de figure où un administrateur d’internat peut se voir priver de son logement de fonction n’a pas pris en compte son cas de figure : le « congé pour mission ». Une faille juridique qui revient à conclure que la personne qui a le plus besoin du logement convoité – ici Mme Libert – en est réglementairement privée… Mais c’est la loi et, dans un Etat de droit, la loi doit être respectée. Ou alors, elle doit être modifiée.
« Plan B » ou « plan C » ?
Le problème, pour Mme Libert, c’est qu’on lui a fait miroiter pendant trop longtemps qu’elle disposerait pourtant bien du logement de Sophie M. On ? Le cabinet de la ministre Simonet. De bonne foi ? Sans doute. Maladroitement ? Certainement. Différentes pièces écrites (courriers, e-mails) en possession de l’administratrice faisant fonction établissent à suffisance que des collaborateurs de la ministre Simonet lui ont explicitement indiqué qu’ils arriveraient à faire « évacuer » ledit logement… « Il était d’abord question de la fin novembre 2007… Dès juillet de l’année dernière, avec l’autorisation du cabinet et pour l’intérêt du service, j’ai donc déménagé vers l’internat. J’ai aménagé un dortoir dans une salle d’étude où il n’y avait même pas de sanitaires. Je l’ai quitté plus tard pour le local insalubre mais mieux sécurisé où je loge encore en ce moment. J’étais persuadée que tout cela était du provisoire… Ensuite, on m’a dit qu’il faudrait attendre la fin décembre 2007. Et puis, il fallait que je patiente jusqu’à la période de carnaval 2008… Ces promesses m’encourageaient à rester dans mon campement… Mais aujourd’hui, je n’ai toujours pas de logement ! »
Terrain juridique mal débroussaillé ? Au bout de plusieurs mois d’attente et après des courriers bien argumentés des avocats de Sophie M., le cabinet de Marie-Dominique Simonet a, de toute évidence, renoncé à encore faire évacuer le logement de fonction. « L’affaire est sur le terrain juridique. Cela nous bloque », nous dit diplomatiquement le chef de cabinet de la ministre. Et c’est d’évidence un plan B qui est privilégié lorsque nous rencontrons Michel Weber : « Il y a plusieurs semaines déjà que Marie-Dominique Simonet a donné des instructions pour qu’une indemnité soit donnée à Mme Libert en compensation de l’absence de logement de fonction. Seulement, voilà : les administrations de l’Enseignement et de l’Infrastructure se sont renvoyées le dossier et on a perdu du temps. Dès la semaine prochaine, je remets cette demande sur la table et je vais œuvrer pour que l’indemnité soit rétroactive. »
« Nous sommes en septembre 2008. Je suis toujours dans mon campement et j’attends encore le premier franc d’indemnité », s’indigne Mme Libert. Et elle menace : « Cela a trop duré. Je suis épuisée. Si cela continue, je vais démissionner. Tant pis pour cet internat qui est en train de reprendre vie ! ». « Ce serait dommage qu’elle parte. Mme Libert fait du bon travail », réagit Michel Weber. Et de poursuivre, élogieux : « Si elle campe sur place, c’est dans l’intérêt du service, car dans cet internat, il peut y avoir des tas de problèmes à régler dans l’urgence. En agissant ainsi, Mme Libert montre qu’elle a une belle conscience professionnelle ; elle vit des moments difficiles pour faire tourner son établissement. C’est pourquoi nous sommes déterminés à trouver une solution financière en attendant… ».
Une solution financière ? Il y a peut-être une autre piste. Nous signalons au chef de cabinet de Mme Simonet que notre enquête nous a amené à découvrir qu’un logement de fonction est toujours occupé par Léona B. alors que, légalement, elle n’y a plus droit. Cette dernière, alors qu’elle était administratrice f.f. à l’Internat autonome de Forest, avait reçu un logement de fonction dans l’internat de l’Athénée royal Victor Horta qui se trouve pratiquement en face. Etant donné que la ministre Simonet a mis fin à sa désignation en juillet 2007, Léona B. devait normalement quitter le logement de fonction et retrouver le poste où elle était nommée (économe à l’Athénée de Koekelberg). Elle n’a pas quitté le logement et, désormais la situation est encore plus cocasse… En effet, Mme Léona B. est retraitée depuis cet été 2008, mais elle est toujours dans son logement de fonction ! « Je ne le savais pas. L’internat de Horta est sous la tutelle du ministre Dupont », nous dit le chef de cabinet de Mme Simonet.
Et, de son côté, Tony Pelosato, le chef de cabinet du ministre Dupont, nous dit qu’il y a dû y avoir « un couac dans la circulation des informations » car, de fait, si Léona B. a perdu son mandat d’administratrice, elle n’a plus à être logée aux frais de la Communauté française ! C’est ainsi qu’apparaît un « plan C » que nous suggérons à nos interlocuteurs ministériels : l’appartement actuellement occupé de manière irrégulière pourrait-il se libérer au profit de Muriel Libert ? Les deux chefs de cabinet se concertent. Ils marquent leur accord. Mme Libert se déclare aussi satisfaite de cette solution. « Je voudrais tout de même voir ce que c’est mais de toute manière, il ne me faut pas le grand luxe. J’ai plus vraiment l’habitude » commente-t-elle avec un certain sens de l’humour. « Cette solution pourrait être acceptable pour notre affiliée. A condition qu’on ne la fasse pas à nouveau languir pendant des mois. Et si on l’indemnise pour les mois de galère qu’elle vient de vivre… C’est tout de même incroyable qu’on en soit là, seulement aujourd’hui… Cette solution se présentait déjà depuis près d’un an puisque Léona B a été démise en juillet 2007 ! », commente Valérie De Nayer.
Un dossier d’indemnisation est aussi en cours nous confirme-t-on tant chez Mme Simonet que chez M.Dupont…
Le bout du tunnel est peut-être très proche pour Mme Libert. Encore faudra-t-il aussi que les actes de vandalisme et de sabotage s’arrêtent à l’IACF. A cet égard, la CGSP-Enseignement par la bouche de Valérie De Nayer suggère « qu’il faudrait sérieusement songer à sécuriser le site dans l’intérêt de tous les travailleurs de l’internat ». Encore une évidence, comme le fait qu’il s’agit d’une affaire à suivre…
Une enquête évoquée le dimanche 7 septembre 2008 sur le plateau de « L’Info Confidentielle Paris-Match/RTL-TVI » et publiée dans l’hebdomadaire Paris Match, le 11 septembre 2008.
Victimes de promesses audacieuses d’un cabinet ministériel et d’un imbroglio administratif, Muriel Libert attend depuis presque deux ans que la Communauté française lui fournisse le logement de fonction auquel elle a droit ou, à défaut, une indemnité compensatoire. En désespoir de cause, depuis plusieurs mois maintenant, l’administratrice sans domicile fixe s’est mise à « camper » dans des locaux insalubres sur son lieu de travail, l’Internat autonome de la Communauté française.

Ex-sportive de haut niveau, Muriel Libert a incontestablement la pêche. Et quand on la rencontre dans son bureau un peu kitsch, rue de Bourgogne à Forest, on comprend vite que cette femme sait ce qu’elle veut. Pas facile d’en placer une quand elle témoigne ! Faut dire qu’à sa place, on serait aussi quelque peu électrisé. En cause, les très nombreuses embûches qui se sont présentées sur sa route depuis qu’elle gère l’Internat autonome de la Communauté française (IACF).
Madame l’administratrice raconte : « J’ai fait un premier passage éclair dans cet établissement au printemps 2005. Deux mois. Je remplaçais Mme Léona B., l’administratrice faisant fonction de l’époque. Cette dame était elle-même le substitut de Mme Sophie M., l’administratrice en titre de l’IACFqui, depuis le 1er septembre 2003, avait entamé un « congé pour mission » (N.d.l.r. : encore en cours) au sein de l’Administration générale de la Communauté française. A Forest, j’ai découvert un vieux paquebot fatigué qui prenait l’eau de toutes parts : le nombre de résidents était dramatiquement bas, la qualité de certains membres du personnel laissait à désirer, la démotivation était omniprésente, et l’état de nombreux locaux était désastreux. Il faisait sale : les rideaux qui pendaient aux fenêtres des chambres n’avaient pas été lavés depuis 1998 ! Et puis, surtout, les comptes de l’internat ne tombaient pas juste, ce qui n’augurait rien de bon pour l’avenir. Malgré ces handicaps, l’endroit me plaisait. Relancer les machines de ce navire en perdition me semblait être un beau défi à relever. »
Fin novembre 2006, c’est donc avec beaucoup d’enthousiasme que Muriel Libert apprend qu’elle est une nouvelle fois désignée pour pallier un autre congé de maladie de Léona B. : « Je ne savais pas combien de temps ce remplacement durerait. Etant domiciliée du côté de Perwez, je faisais les allers-retours. Deux fois par jour quand un pépin se produisait à l’internat. Par exemple, un sabotage ou un vol pendant la nuit… ». De fait, le dossier que nous communique Mme Libert contient de nombreuses plaintes à la police de Forest pour des dégradations diverses portées aux locaux de l’internat.
« Depuis que j’ai pris cette fonction », affirme-t-elle, « les intimidations se sont succédé. Le dernier événement en date étant une mise à sac de ma voiture, qui était garée dans le parking fermé de l’internat. On a aussi saboté le tableau électrique de l’internat, les connections internet, le téléphone. Un soir, on m’a poursuivi dans un couloir, un autre soir quelqu’un a foré dans la serrure de la porte de l’étude dans laquelle je logeais. Je me suis enfuie en sautant par une fenêtre. Parfois, il y a aussi des types bizarres qui circulent dans la cour… » Un vrai film d’épouvante ! Qui voudrait la peau de l’administratrice ? « J’ai bien ma petite idée et j’en ai parlé à la police. Je crois qu’on veut mettre mes nerfs à l’épreuve. On veut me faire péter les plombs, me donner envie de partir d’ici », se contente-t-elle de répondre, énigmatique… Renseignement pris à bonne source, Mme Libert a désigné deux suspects à la police : Sophie M., l’administratrice en « congé », et un membre du personnel de l’internat.
Sophie M. s’inscrit en faux contre de ces allégations mais, selon son syndicat, elle ne peut nous faire valoir ses arguments de vive voix ! Le cabinet de Marie-Dominique Simonet (cdH), qui exerce la tutelle sur l’internat, nous a pourtant indiqué qu’il ne voyait aucun inconvénient à ce que cette dame – à l’instar de Mme Libert – puisse s’exprimer publiquement… « Certes, mais c’est Jean-Pierre Hubin, l’administrateur général de la Communauté française, où Mme M. est en mission pour l’instant, qui s’y oppose », nous dit le président du SLFP (Syndicat libre de la Fonction Publique), Yves Delbeck. Et d’ajouter que « dans cette affaire, c’est plutôt Sophie M. qui se sent agressée par Mme Libert. Chaque fois qu’il y a un problème à l’internat, notre affiliée est montrée du doigt par l’administratrice faisant fonction. C’est une forme de harcèlement ! ».
Impossible pour nous de trancher quant à l’origine des dégradations constatées régulièrement à l’Internat de Forest. On laissera la justice faire son travail. Le seul constat à notre portée étant que Muriel Libert et Sophie M. ont, en tous cas, un gros différend qui pourrait être de nature à ce qu’elles se crêpent le chignon : le logement de fonction de l’Internat.
Tout le monde a raison
« Pour relancer l’activité de l’IACF, Muriel Libert a dû travailler de très longues journées. Au bout d’un certain temps, continuer à loger en province devenait extrêmement pénible en regard de sa tâche d’administratrice, qui nécessite une présence quasi permanente sur son lieu de travail. Alors, elle a demandé ce qui lui était dû légalement : un logement de fonction », explique la syndicaliste Valérie De Nayer (C.g.s.p.-Enseignement), qui épaule l’administratrice sans domicile fixe depuis des mois. Muriel Libert complète : « Petit à petit, ma situation est devenue moins provisoire. Léona B., la dame qui m’avait précédée au poste d’administratrice faisant fonction, a été l’objet d’une enquête pour mauvaise gestion. En juillet 2007, la ministre Simonet a mis fin à sa désignation. A partir de là, je devenais véritablement l’administratrice faisant fonction. Obtenant de bons résultats (retour des inscriptions, obtention de subsides pour rénover des locaux, conventions avec l’A.d.e.p.s., des ambassades étrangères…), je voulais m’investir plus encore. L’intérêt du service commandait que je sois présente sur place le plus souvent possible, la disponibilité étant essentielle pour une administratrice d’internat. C’est aussi ce contexte qui contribué à ce que je demande à la Communauté française de m’octroyer le logement normalement lié à ma fonction. »
Un arrêté royal du 26 février 1965 prévoit, en effet, que les administrateurs d’internat font partie des agents de l’Etat « astreints à occuper des logements déterminés parce que leurs fonctions réclament leur présence permanente sur les lieux du travail ». En d’autres termes, la Communauté française est tenue de mettre à la disposition de ces agents un logement sur les lieux du travail (art. 2 de l’Arrêté) ; si ce n’est pas possible, « il met à leur disposition une habitation située dans un rayon de 2 km des lieux du travail » (art. 3). En outre, la Communauté française fournit le gaz, le chauffage et l’électricité dans ces logements de fonction.
Sur le site de l’IACF de Forest, un tel logement de fonction existe mais il est occupé depuis plus de vingt ans par l’administratrice en titre, Sophie M. Et pour elle, pas question de le quitter ! Notre enquête confirme que Sophie M. n’exerce plus réellement la fonction de gestionnaire de l’internat depuis 2003, car elle est « en congé pour mission sous la responsabilité fonctionnelle de l’administrateur général de la Communauté française », où elle est active dans le domaine de l’Education relative à l’environnement. Sur le site www.enseignement.be, on peut lire que les écoles qui veulent se mettre en rapport avec Sophie M. – par exemple pour l’organisation de classes de dépaysement – doivent écrire au n°107 de l’avenue Victor Rousseau à Forest. Cette adresse est aussi celle du logement de fonction de l’Internat… qui est donc aussi officiellement son lieu de travail.
Qui a droit au logement de fonction de l’IACF ? Muriel Libert ou Sophie M. ? La ministre de l’Enseignement supérieur a d’abord pris clairement le parti de Mme Libert. « Camper de la sorte dans des locaux sommairement aménagés, ce n’est pas une situation correcte. C’est pourquoi, en août dernier, on a enjoint à Sophie M. de libérer le logement de fonction dans les quatre mois », confirme Michel Weber, le chef de cabinet de Marie-Dominique Simonet. Du point de vue du syndicat de Mme Libert, une telle décision était l’évidence : « Même si elle n’est pas l’administratrice en titre, c’est elle qui exerce effectivement la fonction, elle en a toutes les charges (horaires astreignants, nécessité de disponibilité). Elle doit donc aussi disposer des facilités liées à l’accomplissement de cette tâche. Il n’y a par contre aucune nécessité fonctionnelle à la présence de Sophie M. dans ce logement », estime Valérie De Nayer.
Cela dit, Sophie M. ne manque pas d’arguments. Certains ne sont pas pertinents du tout : « Quand on lui a signifié notre intention de la voir quitter le logement, on a reçu des interventions de toutes parts. Anciens directeurs généraux, hommes politiques de différents partis », affirme Michel Weber. Un étalage relationnel pourtant bien inutile, car les arguments juridiques qu’ont développé les avocats de l’administratrice en titre semblent largement suffire à lui garantir la conservation de son logement de fonction. Outre le fait qu’il s’agit de l’adresse officielle d’où elle exerce sa mission actuelle, les avocats de Sophie M. ont fait remarquer au cabinet Simonet que leur cliente pourrait redevenir à tout moment, selon son souhait, l’administratrice effective de l’IACF. « En plus, du temps du ministre Hazette (MR), quand Sophie M. a été nommée pour sa mission, la question du logement n’a pas du tout été posée… C’est tout à fait injuste de la mettre maintenant sur le tapis », déclare le président du SLFP, qui nous annonce au passage que Sophie M. compte bien reprendre sa place après 2009… Alors qu’elle aura pratiquement atteint l’âge de la pension.
Sophie M. dispose encore d’un autre argument juridique béton : l’article de l’arrêté royal de 1965 qui prévoit les cas de figure où un administrateur d’internat peut se voir priver de son logement de fonction n’a pas pris en compte son cas de figure : le « congé pour mission ». Une faille juridique qui revient à conclure que la personne qui a le plus besoin du logement convoité – ici Mme Libert – en est réglementairement privée… Mais c’est la loi et, dans un Etat de droit, la loi doit être respectée. Ou alors, elle doit être modifiée.
« Plan B » ou « plan C » ?
Le problème, pour Mme Libert, c’est qu’on lui a fait miroiter pendant trop longtemps qu’elle disposerait pourtant bien du logement de Sophie M. On ? Le cabinet de la ministre Simonet. De bonne foi ? Sans doute. Maladroitement ? Certainement. Différentes pièces écrites (courriers, e-mails) en possession de l’administratrice faisant fonction établissent à suffisance que des collaborateurs de la ministre Simonet lui ont explicitement indiqué qu’ils arriveraient à faire « évacuer » ledit logement… « Il était d’abord question de la fin novembre 2007… Dès juillet de l’année dernière, avec l’autorisation du cabinet et pour l’intérêt du service, j’ai donc déménagé vers l’internat. J’ai aménagé un dortoir dans une salle d’étude où il n’y avait même pas de sanitaires. Je l’ai quitté plus tard pour le local insalubre mais mieux sécurisé où je loge encore en ce moment. J’étais persuadée que tout cela était du provisoire… Ensuite, on m’a dit qu’il faudrait attendre la fin décembre 2007. Et puis, il fallait que je patiente jusqu’à la période de carnaval 2008… Ces promesses m’encourageaient à rester dans mon campement… Mais aujourd’hui, je n’ai toujours pas de logement ! »
Terrain juridique mal débroussaillé ? Au bout de plusieurs mois d’attente et après des courriers bien argumentés des avocats de Sophie M., le cabinet de Marie-Dominique Simonet a, de toute évidence, renoncé à encore faire évacuer le logement de fonction. « L’affaire est sur le terrain juridique. Cela nous bloque », nous dit diplomatiquement le chef de cabinet de la ministre. Et c’est d’évidence un plan B qui est privilégié lorsque nous rencontrons Michel Weber : « Il y a plusieurs semaines déjà que Marie-Dominique Simonet a donné des instructions pour qu’une indemnité soit donnée à Mme Libert en compensation de l’absence de logement de fonction. Seulement, voilà : les administrations de l’Enseignement et de l’Infrastructure se sont renvoyées le dossier et on a perdu du temps. Dès la semaine prochaine, je remets cette demande sur la table et je vais œuvrer pour que l’indemnité soit rétroactive. »
« Nous sommes en septembre 2008. Je suis toujours dans mon campement et j’attends encore le premier franc d’indemnité », s’indigne Mme Libert. Et elle menace : « Cela a trop duré. Je suis épuisée. Si cela continue, je vais démissionner. Tant pis pour cet internat qui est en train de reprendre vie ! ». « Ce serait dommage qu’elle parte. Mme Libert fait du bon travail », réagit Michel Weber. Et de poursuivre, élogieux : « Si elle campe sur place, c’est dans l’intérêt du service, car dans cet internat, il peut y avoir des tas de problèmes à régler dans l’urgence. En agissant ainsi, Mme Libert montre qu’elle a une belle conscience professionnelle ; elle vit des moments difficiles pour faire tourner son établissement. C’est pourquoi nous sommes déterminés à trouver une solution financière en attendant… ».
Une solution financière ? Il y a peut-être une autre piste. Nous signalons au chef de cabinet de Mme Simonet que notre enquête nous a amené à découvrir qu’un logement de fonction est toujours occupé par Léona B. alors que, légalement, elle n’y a plus droit. Cette dernière, alors qu’elle était administratrice f.f. à l’Internat autonome de Forest, avait reçu un logement de fonction dans l’internat de l’Athénée royal Victor Horta qui se trouve pratiquement en face. Etant donné que la ministre Simonet a mis fin à sa désignation en juillet 2007, Léona B. devait normalement quitter le logement de fonction et retrouver le poste où elle était nommée (économe à l’Athénée de Koekelberg). Elle n’a pas quitté le logement et, désormais la situation est encore plus cocasse… En effet, Mme Léona B. est retraitée depuis cet été 2008, mais elle est toujours dans son logement de fonction ! « Je ne le savais pas. L’internat de Horta est sous la tutelle du ministre Dupont », nous dit le chef de cabinet de Mme Simonet.
Et, de son côté, Tony Pelosato, le chef de cabinet du ministre Dupont, nous dit qu’il y a dû y avoir « un couac dans la circulation des informations » car, de fait, si Léona B. a perdu son mandat d’administratrice, elle n’a plus à être logée aux frais de la Communauté française ! C’est ainsi qu’apparaît un « plan C » que nous suggérons à nos interlocuteurs ministériels : l’appartement actuellement occupé de manière irrégulière pourrait-il se libérer au profit de Muriel Libert ? Les deux chefs de cabinet se concertent. Ils marquent leur accord. Mme Libert se déclare aussi satisfaite de cette solution. « Je voudrais tout de même voir ce que c’est mais de toute manière, il ne me faut pas le grand luxe. J’ai plus vraiment l’habitude » commente-t-elle avec un certain sens de l’humour. « Cette solution pourrait être acceptable pour notre affiliée. A condition qu’on ne la fasse pas à nouveau languir pendant des mois. Et si on l’indemnise pour les mois de galère qu’elle vient de vivre… C’est tout de même incroyable qu’on en soit là, seulement aujourd’hui… Cette solution se présentait déjà depuis près d’un an puisque Léona B a été démise en juillet 2007 ! », commente Valérie De Nayer.
Un dossier d’indemnisation est aussi en cours nous confirme-t-on tant chez Mme Simonet que chez M.Dupont…
Le bout du tunnel est peut-être très proche pour Mme Libert. Encore faudra-t-il aussi que les actes de vandalisme et de sabotage s’arrêtent à l’IACF. A cet égard, la CGSP-Enseignement par la bouche de Valérie De Nayer suggère « qu’il faudrait sérieusement songer à sécuriser le site dans l’intérêt de tous les travailleurs de l’internat ». Encore une évidence, comme le fait qu’il s’agit d’une affaire à suivre…
Une enquête évoquée le dimanche 7 septembre 2008 sur le plateau de « L’Info Confidentielle Paris-Match/RTL-TVI » et publiée dans l’hebdomadaire Paris Match, le 11 septembre 2008.
Victimes de promesses audacieuses d’un cabinet ministériel et d’un imbroglio administratif, Muriel Libert attend depuis presque deux ans que la Communauté française lui fournisse le logement de fonction auquel elle a droit ou, à défaut, une indemnité compensatoire. En désespoir de cause, depuis plusieurs mois maintenant, l’administratrice sans domicile fixe s’est mise à « camper » dans des locaux insalubres sur son lieu de travail, l’Internat autonome de la Communauté française.

Ex-sportive de haut niveau, Muriel Libert a incontestablement la pêche. Et quand on la rencontre dans son bureau un peu kitsch, rue de Bourgogne à Forest, on comprend vite que cette femme sait ce qu’elle veut. Pas facile d’en placer une quand elle témoigne ! Faut dire qu’à sa place, on serait aussi quelque peu électrisé. En cause, les très nombreuses embûches qui se sont présentées sur sa route depuis qu’elle gère l’Internat autonome de la Communauté française (IACF).
Madame l’administratrice raconte : « J’ai fait un premier passage éclair dans cet établissement au printemps 2005. Deux mois. Je remplaçais Mme Léona B., l’administratrice faisant fonction de l’époque. Cette dame était elle-même le substitut de Mme Sophie M., l’administratrice en titre de l’IACFqui, depuis le 1er septembre 2003, avait entamé un « congé pour mission » (N.d.l.r. : encore en cours) au sein de l’Administration générale de la Communauté française. A Forest, j’ai découvert un vieux paquebot fatigué qui prenait l’eau de toutes parts : le nombre de résidents était dramatiquement bas, la qualité de certains membres du personnel laissait à désirer, la démotivation était omniprésente, et l’état de nombreux locaux était désastreux. Il faisait sale : les rideaux qui pendaient aux fenêtres des chambres n’avaient pas été lavés depuis 1998 ! Et puis, surtout, les comptes de l’internat ne tombaient pas juste, ce qui n’augurait rien de bon pour l’avenir. Malgré ces handicaps, l’endroit me plaisait. Relancer les machines de ce navire en perdition me semblait être un beau défi à relever. »
Fin novembre 2006, c’est donc avec beaucoup d’enthousiasme que Muriel Libert apprend qu’elle est une nouvelle fois désignée pour pallier un autre congé de maladie de Léona B. : « Je ne savais pas combien de temps ce remplacement durerait. Etant domiciliée du côté de Perwez, je faisais les allers-retours. Deux fois par jour quand un pépin se produisait à l’internat. Par exemple, un sabotage ou un vol pendant la nuit… ». De fait, le dossier que nous communique Mme Libert contient de nombreuses plaintes à la police de Forest pour des dégradations diverses portées aux locaux de l’internat.
« Depuis que j’ai pris cette fonction », affirme-t-elle, « les intimidations se sont succédé. Le dernier événement en date étant une mise à sac de ma voiture, qui était garée dans le parking fermé de l’internat. On a aussi saboté le tableau électrique de l’internat, les connections internet, le téléphone. Un soir, on m’a poursuivi dans un couloir, un autre soir quelqu’un a foré dans la serrure de la porte de l’étude dans laquelle je logeais. Je me suis enfuie en sautant par une fenêtre. Parfois, il y a aussi des types bizarres qui circulent dans la cour… » Un vrai film d’épouvante ! Qui voudrait la peau de l’administratrice ? « J’ai bien ma petite idée et j’en ai parlé à la police. Je crois qu’on veut mettre mes nerfs à l’épreuve. On veut me faire péter les plombs, me donner envie de partir d’ici », se contente-t-elle de répondre, énigmatique… Renseignement pris à bonne source, Mme Libert a désigné deux suspects à la police : Sophie M., l’administratrice en « congé », et un membre du personnel de l’internat.
Sophie M. s’inscrit en faux contre de ces allégations mais, selon son syndicat, elle ne peut nous faire valoir ses arguments de vive voix ! Le cabinet de Marie-Dominique Simonet (cdH), qui exerce la tutelle sur l’internat, nous a pourtant indiqué qu’il ne voyait aucun inconvénient à ce que cette dame – à l’instar de Mme Libert – puisse s’exprimer publiquement… « Certes, mais c’est Jean-Pierre Hubin, l’administrateur général de la Communauté française, où Mme M. est en mission pour l’instant, qui s’y oppose », nous dit le président du SLFP (Syndicat libre de la Fonction Publique), Yves Delbeck. Et d’ajouter que « dans cette affaire, c’est plutôt Sophie M. qui se sent agressée par Mme Libert. Chaque fois qu’il y a un problème à l’internat, notre affiliée est montrée du doigt par l’administratrice faisant fonction. C’est une forme de harcèlement ! ».
Impossible pour nous de trancher quant à l’origine des dégradations constatées régulièrement à l’Internat de Forest. On laissera la justice faire son travail. Le seul constat à notre portée étant que Muriel Libert et Sophie M. ont, en tous cas, un gros différend qui pourrait être de nature à ce qu’elles se crêpent le chignon : le logement de fonction de l’Internat.
Tout le monde a raison
« Pour relancer l’activité de l’IACF, Muriel Libert a dû travailler de très longues journées. Au bout d’un certain temps, continuer à loger en province devenait extrêmement pénible en regard de sa tâche d’administratrice, qui nécessite une présence quasi permanente sur son lieu de travail. Alors, elle a demandé ce qui lui était dû légalement : un logement de fonction », explique la syndicaliste Valérie De Nayer (C.g.s.p.-Enseignement), qui épaule l’administratrice sans domicile fixe depuis des mois. Muriel Libert complète : « Petit à petit, ma situation est devenue moins provisoire. Léona B., la dame qui m’avait précédée au poste d’administratrice faisant fonction, a été l’objet d’une enquête pour mauvaise gestion. En juillet 2007, la ministre Simonet a mis fin à sa désignation. A partir de là, je devenais véritablement l’administratrice faisant fonction. Obtenant de bons résultats (retour des inscriptions, obtention de subsides pour rénover des locaux, conventions avec l’A.d.e.p.s., des ambassades étrangères…), je voulais m’investir plus encore. L’intérêt du service commandait que je sois présente sur place le plus souvent possible, la disponibilité étant essentielle pour une administratrice d’internat. C’est aussi ce contexte qui contribué à ce que je demande à la Communauté française de m’octroyer le logement normalement lié à ma fonction. »
Un arrêté royal du 26 février 1965 prévoit, en effet, que les administrateurs d’internat font partie des agents de l’Etat « astreints à occuper des logements déterminés parce que leurs fonctions réclament leur présence permanente sur les lieux du travail ». En d’autres termes, la Communauté française est tenue de mettre à la disposition de ces agents un logement sur les lieux du travail (art. 2 de l’Arrêté) ; si ce n’est pas possible, « il met à leur disposition une habitation située dans un rayon de 2 km des lieux du travail » (art. 3). En outre, la Communauté française fournit le gaz, le chauffage et l’électricité dans ces logements de fonction.
Sur le site de l’IACF de Forest, un tel logement de fonction existe mais il est occupé depuis plus de vingt ans par l’administratrice en titre, Sophie M. Et pour elle, pas question de le quitter ! Notre enquête confirme que Sophie M. n’exerce plus réellement la fonction de gestionnaire de l’internat depuis 2003, car elle est « en congé pour mission sous la responsabilité fonctionnelle de l’administrateur général de la Communauté française », où elle est active dans le domaine de l’Education relative à l’environnement. Sur le site www.enseignement.be, on peut lire que les écoles qui veulent se mettre en rapport avec Sophie M. – par exemple pour l’organisation de classes de dépaysement – doivent écrire au n°107 de l’avenue Victor Rousseau à Forest. Cette adresse est aussi celle du logement de fonction de l’Internat… qui est donc aussi officiellement son lieu de travail.
Qui a droit au logement de fonction de l’IACF ? Muriel Libert ou Sophie M. ? La ministre de l’Enseignement supérieur a d’abord pris clairement le parti de Mme Libert. « Camper de la sorte dans des locaux sommairement aménagés, ce n’est pas une situation correcte. C’est pourquoi, en août dernier, on a enjoint à Sophie M. de libérer le logement de fonction dans les quatre mois », confirme Michel Weber, le chef de cabinet de Marie-Dominique Simonet. Du point de vue du syndicat de Mme Libert, une telle décision était l’évidence : « Même si elle n’est pas l’administratrice en titre, c’est elle qui exerce effectivement la fonction, elle en a toutes les charges (horaires astreignants, nécessité de disponibilité). Elle doit donc aussi disposer des facilités liées à l’accomplissement de cette tâche. Il n’y a par contre aucune nécessité fonctionnelle à la présence de Sophie M. dans ce logement », estime Valérie De Nayer.
Cela dit, Sophie M. ne manque pas d’arguments. Certains ne sont pas pertinents du tout : « Quand on lui a signifié notre intention de la voir quitter le logement, on a reçu des interventions de toutes parts. Anciens directeurs généraux, hommes politiques de différents partis », affirme Michel Weber. Un étalage relationnel pourtant bien inutile, car les arguments juridiques qu’ont développé les avocats de l’administratrice en titre semblent largement suffire à lui garantir la conservation de son logement de fonction. Outre le fait qu’il s’agit de l’adresse officielle d’où elle exerce sa mission actuelle, les avocats de Sophie M. ont fait remarquer au cabinet Simonet que leur cliente pourrait redevenir à tout moment, selon son souhait, l’administratrice effective de l’IACF. « En plus, du temps du ministre Hazette (MR), quand Sophie M. a été nommée pour sa mission, la question du logement n’a pas du tout été posée… C’est tout à fait injuste de la mettre maintenant sur le tapis », déclare le président du SLFP, qui nous annonce au passage que Sophie M. compte bien reprendre sa place après 2009… Alors qu’elle aura pratiquement atteint l’âge de la pension.
Sophie M. dispose encore d’un autre argument juridique béton : l’article de l’arrêté royal de 1965 qui prévoit les cas de figure où un administrateur d’internat peut se voir priver de son logement de fonction n’a pas pris en compte son cas de figure : le « congé pour mission ». Une faille juridique qui revient à conclure que la personne qui a le plus besoin du logement convoité – ici Mme Libert – en est réglementairement privée… Mais c’est la loi et, dans un Etat de droit, la loi doit être respectée. Ou alors, elle doit être modifiée.
« Plan B » ou « plan C » ?
Le problème, pour Mme Libert, c’est qu’on lui a fait miroiter pendant trop longtemps qu’elle disposerait pourtant bien du logement de Sophie M. On ? Le cabinet de la ministre Simonet. De bonne foi ? Sans doute. Maladroitement ? Certainement. Différentes pièces écrites (courriers, e-mails) en possession de l’administratrice faisant fonction établissent à suffisance que des collaborateurs de la ministre Simonet lui ont explicitement indiqué qu’ils arriveraient à faire « évacuer » ledit logement… « Il était d’abord question de la fin novembre 2007… Dès juillet de l’année dernière, avec l’autorisation du cabinet et pour l’intérêt du service, j’ai donc déménagé vers l’internat. J’ai aménagé un dortoir dans une salle d’étude où il n’y avait même pas de sanitaires. Je l’ai quitté plus tard pour le local insalubre mais mieux sécurisé où je loge encore en ce moment. J’étais persuadée que tout cela était du provisoire… Ensuite, on m’a dit qu’il faudrait attendre la fin décembre 2007. Et puis, il fallait que je patiente jusqu’à la période de carnaval 2008… Ces promesses m’encourageaient à rester dans mon campement… Mais aujourd’hui, je n’ai toujours pas de logement ! »
Terrain juridique mal débroussaillé ? Au bout de plusieurs mois d’attente et après des courriers bien argumentés des avocats de Sophie M., le cabinet de Marie-Dominique Simonet a, de toute évidence, renoncé à encore faire évacuer le logement de fonction. « L’affaire est sur le terrain juridique. Cela nous bloque », nous dit diplomatiquement le chef de cabinet de la ministre. Et c’est d’évidence un plan B qui est privilégié lorsque nous rencontrons Michel Weber : « Il y a plusieurs semaines déjà que Marie-Dominique Simonet a donné des instructions pour qu’une indemnité soit donnée à Mme Libert en compensation de l’absence de logement de fonction. Seulement, voilà : les administrations de l’Enseignement et de l’Infrastructure se sont renvoyées le dossier et on a perdu du temps. Dès la semaine prochaine, je remets cette demande sur la table et je vais œuvrer pour que l’indemnité soit rétroactive. »
« Nous sommes en septembre 2008. Je suis toujours dans mon campement et j’attends encore le premier franc d’indemnité », s’indigne Mme Libert. Et elle menace : « Cela a trop duré. Je suis épuisée. Si cela continue, je vais démissionner. Tant pis pour cet internat qui est en train de reprendre vie ! ». « Ce serait dommage qu’elle parte. Mme Libert fait du bon travail », réagit Michel Weber. Et de poursuivre, élogieux : « Si elle campe sur place, c’est dans l’intérêt du service, car dans cet internat, il peut y avoir des tas de problèmes à régler dans l’urgence. En agissant ainsi, Mme Libert montre qu’elle a une belle conscience professionnelle ; elle vit des moments difficiles pour faire tourner son établissement. C’est pourquoi nous sommes déterminés à trouver une solution financière en attendant… ».
Une solution financière ? Il y a peut-être une autre piste. Nous signalons au chef de cabinet de Mme Simonet que notre enquête nous a amené à découvrir qu’un logement de fonction est toujours occupé par Léona B. alors que, légalement, elle n’y a plus droit. Cette dernière, alors qu’elle était administratrice f.f. à l’Internat autonome de Forest, avait reçu un logement de fonction dans l’internat de l’Athénée royal Victor Horta qui se trouve pratiquement en face. Etant donné que la ministre Simonet a mis fin à sa désignation en juillet 2007, Léona B. devait normalement quitter le logement de fonction et retrouver le poste où elle était nommée (économe à l’Athénée de Koekelberg). Elle n’a pas quitté le logement et, désormais la situation est encore plus cocasse… En effet, Mme Léona B. est retraitée depuis cet été 2008, mais elle est toujours dans son logement de fonction ! « Je ne le savais pas. L’internat de Horta est sous la tutelle du ministre Dupont », nous dit le chef de cabinet de Mme Simonet.
Et, de son côté, Tony Pelosato, le chef de cabinet du ministre Dupont, nous dit qu’il y a dû y avoir « un couac dans la circulation des informations » car, de fait, si Léona B. a perdu son mandat d’administratrice, elle n’a plus à être logée aux frais de la Communauté française ! C’est ainsi qu’apparaît un « plan C » que nous suggérons à nos interlocuteurs ministériels : l’appartement actuellement occupé de manière irrégulière pourrait-il se libérer au profit de Muriel Libert ? Les deux chefs de cabinet se concertent. Ils marquent leur accord. Mme Libert se déclare aussi satisfaite de cette solution. « Je voudrais tout de même voir ce que c’est mais de toute manière, il ne me faut pas le grand luxe. J’ai plus vraiment l’habitude » commente-t-elle avec un certain sens de l’humour. « Cette solution pourrait être acceptable pour notre affiliée. A condition qu’on ne la fasse pas à nouveau languir pendant des mois. Et si on l’indemnise pour les mois de galère qu’elle vient de vivre… C’est tout de même incroyable qu’on en soit là, seulement aujourd’hui… Cette solution se présentait déjà depuis près d’un an puisque Léona B a été démise en juillet 2007 ! », commente Valérie De Nayer.
Un dossier d’indemnisation est aussi en cours nous confirme-t-on tant chez Mme Simonet que chez M.Dupont…
Le bout du tunnel est peut-être très proche pour Mme Libert. Encore faudra-t-il aussi que les actes de vandalisme et de sabotage s’arrêtent à l’IACF. A cet égard, la CGSP-Enseignement par la bouche de Valérie De Nayer suggère « qu’il faudrait sérieusement songer à sécuriser le site dans l’intérêt de tous les travailleurs de l’internat ». Encore une évidence, comme le fait qu’il s’agit d’une affaire à suivre…